MARIVAUX Pierre
Dramaturge et romancier français. Pierre Carlet de Chamblain de Marivaux. Si le « marivaudage » a longtemps été considéré comme une préciosité pédante ou futile, Marivaux, partisan des Modernes, est devenu un classique : c’est que, à travers le joyeux badinage des Silvia et des Arlequin, percent les complexités de la mécanique du cœur, et que la légèreté du dramaturge masque un profond psychologue. Homme discret, Marivaux sut cependant porter sur son époque un regard d’une étonnante acuité. Journaliste, il scrute les comportements de ses contemporains. Romancier, il ausculte le cœur de ses personnages. Dramaturge, il orchestre le subtil jeu de la vérité et de l’amour, de l’être et de l’apparence. S’il fut à la fois taxé de réalisme outrancier (dans ses romans) et de préciosité exacerbée (dans son théâtre), c’est qu’il s’était placé au point de rupture entre les schémas classiques de représentation et une nouvelle vision de l’homme en train de s’élaborer. Du droit à la comédie-italienne La querelle des Anciens et des Modernes La notoriété A la mort de Mme de Lambert, en 1733, Marivaux fréquente un autre salon, celui de Mme de Tencin. Sa notoriété et ses appuis lui valent d’être élu à l’ Académie française, le 24 décembre 1742, en remplacement de l’abbé Houtteville, contre un rival nommé Voltaire. la même année, il aide Jean-Jacques Rousseau à "retoucher" sa comédie de Narcisse. Durant les vingt dernières années de sa vie, il publie encore quelques comédies, qui ne sont pas représentées, prononce et publie divers discours à l’Académie, essais qui traitent de questions morales et littéraires avec une certaine distance à l’égard de la nouvelle génération des « philosophes ». Un journaliste moraliste Marivaux emprunte la voix d’un philosophe, d’un « homme d’esprit » qui s’exprime librement et sans contraintes formelles, comme un nouveau Montaigne. La critique sévère de ses contemporains, surtout dans l’Indigent philosophe, rappelle parfois la satire du Neveu de Rameau de Diderot, mais le ton général est celui de la gaieté et de la délicatesse. D’une feuille à l’autre se succèdent des réflexions morales, de brefs récits romanesques, des observations sur la vie sociale, sur les femmes et l’amour ou sur des questions de métaphysique. C’est dans les journaux que Marivaux explicite son esthétique et ses exigences à l’égard des auteurs et des lecteurs : à l’instar de ses personnages, il s’agit de faire preuve de naturel sans naïveté, de goût sans préjugés, d’esprit sans vanité ni pédanterie, d’ironie sans désespoir ni acrimonie. Un romancier du cœur et de l’esprit Chacun à sa manière, les récits de la vie de Marianne et de celle du paysan Jacob constituent des aventures psychologiques dans un monde social réaliste, restitué dans sa quotidienneté. On y retrouve, sur le mode narratif, la finesse des analyses psychologiques et la satire des rapports sociaux de l’œuvre théâtrale. En choisissant le genre de l’autobiographie fictive, Marivaux se donne les moyens de jouer sur la dualité du personnage-narrateur. Le naturel du personnage sans expérience tranche avec l’hypocrisie du monde dans lequel se jouent son éducation sentimentale et son ascension sociale. La lucidité du narrateur permet l’observation ironique de la comédie sociale. Elle révèle aussi la relative duplicité de Marianne et de Jacob. En pratiquant l’analyse rétrospective, Marianne avoue sans culpabilité ses propres artifices, sa coquetterie et les ambiguïtés de son comportement. Jacob convient qu’il a su calculer ce que sa franchise et sa jeunesse pouvaient lui rapporter. Lorsque la jeune orpheline obtient la protection de l’aristocratie, elle le doit à une noblesse de cœur qui révèle très probablement une noblesse de sang. Marianne n’est pas parvenue, elle est reconnue. L’itinéraire moral et social du paysan Jacob est à la fois plus ambigu et plus provoquant. Le séduisant jeune homme parvient grâce aux femmes et aussi grâce à son art du compromis entre morale et libertinage. Un dramaturge du naturel La leçon morale On a pu classer l’œuvre dramatique de Marivaux par thèmes et par sous-genres : comédies allégoriques, utopies sociales, pièces d’éducation, comédies d’intrigues, comédies de mœurs, comédies de caractère, comédies de sentiment enfin, donnant à voir tour à tour la naissance de l’amour chez des êtres neufs, les surprises de l’amour chez des êtres avertis ou méfiants, l’inconstance du sentiment, les épreuves de sincérité ou les conflits de l’amour et des préjugés sociaux. Mais on retiendra surtout que chacune des pièces tisse un subtil réseau de correspondances entre ces divers thèmes sociaux et amoureux. Ces variations sur les mêmes motifs constituent, par touches successives, la comédie humaine des jeux de l’amour et de la société dans la première moitié du XVIII e siècle. De nombreuses pièces présentent une vision critique de la société, en particulier les pièces dites utopiques : l’Île des esclaves (1725), qui s’oppose au préjugé de la naissance, l’Île de la Raison (1727), qui administre une leçon de sagesse aux divers représentants de la société européenne, la Nouvelle Colonie (1729), qui met en scène la lutte des sexes et l’opposition des classes sociales. Mais si la critique semble préparer le combat des Lumières, l’appel au réformisme ne dépasse pas, tout compte fait, le stade de la leçon morale. En s’achevant sur un retour à l’ordre social, les pièces utopiques occultent toute révolte subversive. L’épreuve des sentiments Bibliographie Le Père prudent et équitable ou Crispin l’heureux fourbe (1712)
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